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7 août 2011 7 07 /08 /août /2011 21:00
Fenêtres d’Istanbul, 2003, de Gisèle Durero : le héros qui marche dans la nuit

La Trilogie d’Istanbul I : Fenêtres d’Istanbul

La Trilogie d’Istanbul est une somme romanesque se déroulant à Istanbul entre 1985 et 2009. Elle comporte Fenêtres d’Istanbul, (GiTa Yayınları, 2003), Grimoire d’Istanbul, (GiTa Yayınları, 2006) et Secrets d’Istanbul, (GiTa Yayınları, 2009).

Le fil conducteur des trois tomes de la Trilogie d’Istanbul est le personnage nocturne du Tambour du Ramadan ; dans Fenêtres d’Istanbul, il marche seul dans la nuit au fil des rues et tombe amoureux d’une fille à sa fenêtre, Lune-de-Tulle ; il devient chauffeur d’un antiquaire dans Grimoire d’Istanbul et brocanteur dans Secrets d’Istanbul

Le héros de  Fenêtres d’Istanbul, un Tambour du Ramadan ?

Il s’agit d’un personnage hors du commun car il passe ses nuits à marcher seul au fil des rues.

La construction du roman fait alterner les chapitres où le héros avance dans le silence nocturne et ceux consacrés aux autres personnages.

 

Pour un étranger, le Tambour du Ramadan est un personnage du réel extrêmement étonnant.

Car toute la nuit, il parcourt les rues en jouant du tambour pour réveiller les gens qui jeûnent.

Je n’oublierai jamais la première fois où j’ai entendu en Turquie le Tambour du Ramadan. Je venais de m’installer à Istanbul et je ne connaissais pas bien  les coutumes turques. Quelle ne fut pas ma surprise d’entendre dans le silence résonner les coups, puis de voir le Tambour lui-même! C’est de ce choc culturel qu’est issu mon personnage.

Dans Fenêtres d’Istanbul, le Tambour joue le rôle de fil conducteur, son destin croise celui des autres personnages, c’est souvent à la suite de ses apparitions dans la rue que nous apprenons les sentiments de chacun. De plus, il fait rêver les habitants de l’immeuble, en particulier les femmes.

Premier extrait du roman : le Tambour marchant dans la nuit…

Maintenant, la rue dort. Les coups de mon tambour s’enflent dans l’obscurité. Les lumières s’allument. Des nuées de flocons de neige tournent comme des papillons dans le faisceau des réverbères. De temps en temps, un chien des rues s’approche, la queue rabattue entre les pattes et me jette un aboiement craintif. J’avance. La baguette à tampon vibre sur le parchemin, je marche au milieu de la chaussée, dans les rues désertes de la nuit. Les poils de ma barbe givrée me tendent le visage. Parfois, une main ouvre la fenêtre et me jette une pièce. S’il n’y avait pas ma belle apparition, je ne serais jamais revenu dans ce quartier où la plupart des gens ne jeûnent  pas. Je ne gagnerai rien. Mais l’argent m’indiffère. Tout ce que je voudrais, c’est qu’elle soit derrière la vitre, qu’elle entrouvre la tenture, qu’elle me regarde encore avec ses yeux d’enfant triste.

Là-haut, une jeune femme boulotte berce un bébé devant la vitre. Elle me regarde sans me voir. Il me semble qu’elle se trouve à la même fenêtre que le vieil homme aperçu la nuit dernière. Soudain, la lumière s’est allumée au rez-de-chaussée. Je vais voir le visage de Lune-de-Tulle. Elle écarte le rideau et ouvre la croisée.

— N’oublie pas Lune-de-Tulle, prononce-t-elle dans un murmure.

A toute allure, elle claque la crémone et rabat le tissu.

 

Deuxième extrait du roman : les dangers de la nuit, l'attaque du chien errant...

Je m’enfuis à toutes jambes. La rue est encore déserte. Ni matinaux, ni noctambules attardés, seulement la neige qui se répand en eau dès qu’elle touche  l’asphalte.

Et soudain, une chien surgit d’une ruelle obscure, il s’approche en grognant, je tape du pied sans parvenir à l’intimider, il me montre les dents avec hargne, je frappe dans mes mains mais à l’instant, il bondit et me saisit au poignet, une douleur fulgurante me déchire le bras, je hurle,  je ne vois que ses yeux  verdâtres! Alors apparaît un fou en train de pousser des cris de coq, le chien me lâche la main, je lui décoche un coup de pied et il décampe la queue entre les pattes. Le fou s’approche de moi, regarde effarouché ma main couverte de sang et prend aussi la poudre d’escampette en  coqueriquant.

Je reste seul  dans Istiklâl Caddesi, il me faudra marcher vers le lycée de Galatasaray  et descendre vers la fontaine pour y laver mon bras, en attendant, je contemple mon sang  qui coule en gouttes larges sur la neige et je me sens désespéré. Je ne suis qu’un des déchets de cette ville immense, un  pauvre hère de Tambour de Ramadan sans nom et sans foyer, je n’aurais qu’à partir aux collines d’ordures, à me lover dans un des monticules et attendre, personne d’autre qu’Azraël  ne viendrait me chercher...


 


 

Ce personnage nocturne du Tambour du Ramadan, fut pour moi si poétique, si surréaliste même, que j’en ai fait le personnage principal de mon roman Fenêtres d’Istanbul et que je lui ai encore consacré un texte dans Mes Istamboulines (2010).

Fenêtres d’Istanbul, 2003, de Gisèle Durero : le héros qui marche dans la nuit
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4 août 2011 4 04 /08 /août /2011 22:32

Journal Cumhuriyet Kitap du 28 juillet 2011

Article de Meliha Akay sur La Trilogie d'Istanbul, La Sultane Mahpéri et Mes Istamboulines

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27 février 2011 7 27 /02 /février /2011 14:08

         Le numéro 308, de février 2011, de la revue du Türsab,  Association des Agences de voyage de Turquie ( Türkiye Seyahat Acentaları Birliği ou Association of Turkish Travel Agencies) vient de mettre à l’honneur, en turc et en anglais, İstanbulin, version turque de Mes Istamboulines !  

Une belle surprise en cette matinée d’hiver !

Merci aux agents de voyage turcs !

Türsab'a teşekkür ederim !


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Pour informations sur mes livres, mon site : link

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8 décembre 2010 3 08 /12 /décembre /2010 23:00

TurquieVision est une nouvelle agence de voyages, crée par des professionnels spécialistes de longue date de la Turquie. Le catalogue 2011, illustré de magnifiques photos,  vient de paraître.

Je suis heureuse d’y avoir apporté une modeste contribution en écrivant l’introduction consacrée à la ville d’Istanbul.

Mais ce n’est pas tout : cette agence offrira Mes Istamboulines à chaque voyageur visitant la Turquie avec TurquieVision.

Pour ceux et celles qui n’auraient à ce jour ni découvert la Turquie ni lu Mes Istamboulines, voilà l’occasion de faire d’une pierre deux coups. Qu’on se le dise !

 

 

istanbul turquievision

 

 

link Catalogue de TurquieVision

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5 décembre 2010 7 05 /12 /décembre /2010 07:04

  Un jour de septembre 1983, je me suis embarquée sur un ferry-boat appelé l’« Istanbul », qui effectuait l’aller-retour entre Marseille et Izmir. Ce fut le premier jour de ma nouvelle vie. Un accouchement ou une renaissance. Je tournais une page. Repartir à zéro. S’habiller d’une autre peau. Je ne savais pas si elle serait plus confortable que l’ancienne. Mais je voulais la revêtir.

 

Galata Köprüsü. Yayımcı Max Fruchtermann, .21.

Méditerranéenne, fille de la Côte d’Azur et de Provence, je venais de subir un an d’exil dans les brumes du Pas-de-Calais, ma première mutation de professeur. Les trois jours de navigation en pleine mer me permettaient de dresser le bilan de ma vie. Le bilan. Enfin... Ou, déjà. Je me penchais sur ma prime jeunesse  et se dressaient dans ma mémoire les monolithes de ce que je considérais comme mes échecs. Un des plus blessants pour mon amour-propre, écrivaine ratée. A mon actif, à cette époque, quatre recueils de poésies entassés dans mes tiroirs et  un coup de couteau dans le cœur, le refus de Gallimard de les éditer. Plus un premier roman inachevé, que j’avais l’intention de finir en Turquie. Je me disais donc que je n’avais rien à perdre. Sur le plan professionnel, j’avais trouvé un poste dans un lycée franco-turc d’Istanbul. De toute façon, rien ne pouvait être pire que ma solitude dans le Nord de la France. Sur le plan sentimental, j’avais peut-être enfin trouvé l’amour mais loin, trop loin...

 

Sarayburnu, M. İsraelowitz.

Parfois, je montais sur le pont du ferry-boat et je restais appuyée au bastingage à regarder les vagues. Je rêvais, je méditais. Puis, j’allais dans ma cabine et je brodais des violettes, ma fleur préférée, sur un napperon.

Le dernier jour de la traversée, j’ai mis une robe rouge à pois blancs et dès l’aube, suis allée me poster à l’avant du bateau, pour jouer à la figure de proue. Je voulais voir s’approcher peu à peu la terre où j’allais tenter de me transplanter, ne serait-ce que pour quelques mois. Consciente du risque. Quand le ferry-boat a pénétré dans le port d’Izmir, je tentai de distinguer sa silhouette, de l’apercevoir. Lui. Celui pour lequel j’étais venue. Je me demandais ce qu’il devait penser en cet instant précis. Que peut ressentir un homme attendant une femme qui vient de tout quitter pour lui et qui arrive, un matin de septembre, avec sa voiture bourrée de livres et de quelques bibelots, inséparables témoins de ma route ? Importance ? Incertitude ? Peur de s’être un trop engagé ? Je le savais, ses doutes n’étaient pas moindres que les miens...

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12 septembre 2010 7 12 /09 /septembre /2010 05:27

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Je suis Gisèle Durero-Koseoglu, écrivaine française d’Istanbul, une des représentantes de la littérature francophone de Turquie

 

Site Internet :    http://giseleistanbul.com/

 

Française, je vis depuis longtemps à Istanbul, où j’exerce le métier de professeur de Lettres. La ville d’Istanbul et l’histoire turque constituent mes principaux sujets d’inspiration. Mes livres paraissent simultanément en français et en turc et depuis 2009, en grec.

 

Mes  livres :

 

Dynasties de Turquie médiévale :

 

-La Sultane Mahpéri (Editions GiTa Yayinlari, 2004)

 

-Sultane Gurdju Soleil du Lion (Editions GiTa et Ataturquie, 2015)

 

La Trilogie d’Istanbul (romans) :

 

Fenêtres d’Istanbul (Editions Bartok 2003, Editions GiTa 2006)

Grimoire d’Istanbul (Editions GiTa Yayinlari, 2006)

Secrets d’Istanbul (Editions GiTa Yayinlari, 2009)

 

Mes Istamboulines, Essais, récits et nouvelles, (Editions GiTa Yayinlari, 2010)

 

Janus Istanbul, pièce de théâtre musical, 2012

 

Gisèle Durero-Koseoglu présente un roman turc de Claude Farrère, L'Homme qui assassina, 2013, Editions GiTa

 

 

Où trouver mes livres ?

 

En français :

En France sur Amazon.fr link 

Ataturquie.fr link

En Turquie, dans toutes les librairies vendant des livres en français, sur les sites de libraires Internet, aux Editions GiTa Yayinlari link

En turc :

Dans toutes les librairies de Turquie.

 

 

 

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3 septembre 2010 5 03 /09 /septembre /2010 17:18

 

Un de mes lieux de prédilection sur le Bosphore, à l’entrée de la Mer Noire, est le village de Rumeli Feneri, battu par les tempêtes et dont le phare gigantesque comporte la particularité d’être construit sur le tombeau d’un saint.

Cet endroit romantique et chargé d’histoire ne constitue-t-il pas un repaire idéal pour les écrivains ?

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Je dédie cet article à Nathalie Ritzmann, une autre passionnée de Rumeli Feneri…

 

  La forteresse de Rumeli Feneri dans Fenêtres d’Istanbul (2003)

 

Ils arrivent au bout du Bosphore, au village de pêcheurs de Rumeli Feneri, le phare de Roumélie, à l’embouchure de la Mer Noire. Ils ne se disent rien. Précieuse savoure chaque instant, elle admire le monumental édifice blanc qui veille face aux vagues.

— Tu veux te promener dans l’ancienne forteresse ? demande Gerfaut.

Précieuse acquiesce d’un hochement de tête. Ils pénètrent dans l’immense terre-plein en forme de fer à cheval, s’engagent sous les arceaux des remparts et se retrouvent face à l’immensité de la mer, qui déferle depuis l’horizon en gigantesques vagues se fracassant sur les brisants en contrebas.

— Viens, l’invite-t-il, on va descendre.

Mais Précieuse a peur. D’énormes pierres plates et glissantes s’abaissent jusqu’aux flots dont la crête jaillit en tourbillons d’écume. Gerfaut la tire vers les eaux en furie, mais Précieuse reste paralysée sur un rocher, elle ne peut plus ni avancer, ni reculer. Elle imagine une secousse tellurique, un raz-de-marée.

— J’ai peur, murmure-t-elle en pivotant légèrement pour échapper au  fouettement du vent.

Une odeur d’algue et d’iode lui pique les narines, son visage se crispe sous le sel des rafales, il la prend par la main et la force à se jeter dans ses bras, les pieds en équilibre sur la roche.

— Je t’aime, dit-il. Je suis tombé amoureux de toi dès le premier jour. J’ai voulu te le dire l’autre soir mais je n’ai pas osé, parce que je ne voulais pas accepter qu’une chose si bête m’arrive, à mon âge ! Cette tempête est en accord avec mon cœur.

Précieuse est transportée de joie.

 

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— Est-il possible que tu sois sincère ? demande-t-elle, hésitante.

— Je prends le ciel à témoin ! Si je ne le suis pas, que ces eaux démontées m’engloutissent ! répond-il en riant.

Il la serre plus fort dans ses bras et lui embrasse les paupières.

— Dis-moi que tu m’aimes aussi, sinon, je t’entraîne et on sera tous deux emportés par les lames qui rebondissent sur les écueils, allez, dis-le, dis- le !

— Je t’aime, articule Précieuse, mais aide-moi à remonter, je glisse, je n’arrive plus à résister à la force du vent.

Il passe au-dessus d’elle et la hisse, les mouettes posées sur les remparts criaillent en les regardant, ils se mettent à l’abri sous la muraille byzantine.

 

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 — Viens, dit-il, on va sur le chemin de ronde.

— Tu es fou ! Pas là-haut ! Si ça tremble...

Il la tire et ils gravissent l’escalier d’une tour. Précieuse hésite sur le sentier surplombant le vide, il l’étreint à nouveau, le vent s’est épaissi de neige et bientôt, un rideau cotonneux obstrue la plaine de la mer. Il lui propose d’aller dîner. Le crépuscule installe un demi-jour…

 

 

Rumeli Feneri : Les Symplégades dans Mes Istamboulines, Début de l’Article « Iles Cyanées »,  (2010)

 

A l’endroit où le Bosphore se jette dans le Pont-Euxin, au site actuel de Rumeli Feneri, se dressaient jadis les fameuses Symplégades ou îles Cyanées, de monstrueuses roches flottantes se déplaçant dans l’isthme et broyant les navires dans leur étau de pierre.

La mythologie nous raconte les aventures de Jason et des Argonautes, qui, partis à la conquête de la Toison d’Or, durent  affronter ces monstres pour entrer en mer Noire…

 

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Rumeli Feneri : Les Symplégades dans Secrets d’Istanbul (2009)

 

— Mais au fait, ce n’est pas dangereux de sortir du Bosphore ? questionna Alice, contrariée par la colère de Violeta, pour changer le sujet de conversation. On entend toujours dire que les courants de la Mer Noire sont violents et imprévisibles.

— C’est exact mais je ne sors jamais sans m’informer de la météo. Et puis, j’ai des années d’expérience de ces eaux.

— Prenez garde quand même aux Symplégades, commenta Antonio en riant.

         — Oh, ne vous  inquiétez pas ! Ce qui reste des monstres a été emprisonné dans la digue de Rumeli Feneri, si je ne m’abuse ?

— Mais de quoi parlez-vous ? s’enquit Violeta avec étonnement.

— D’immenses roches bleues situées à l’embouchure de la Mer Noire. Les Anciens croyaient qu’elles flottaient et se déplaçaient sur l’eau pour broyer les bateaux dans leur étau de pierre.

— Oui, mais c’est de la mythologie, tout cela ! dit Violeta.

 

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— Certes, répondit Antonio, mais vous connaissez l’histoire de Jason. Lorsque la nef Argo est arrivée devant les Roches Cyanées, - c’est un des noms de ces écueils, les Argonautes, terrorisés par le vacarme des blocs frappant les uns contre les autres, ont eu l’idée d’envoyer une colombe en reconnaissance. L’oiseau a réussi à passer entre les deux murailles, il n’y a perdu que les plumes de sa queue. Alors, les falaises se sont à nouveau écartées dans un fracas épouvantable et le navire, après avoir affronté tourbillons et ressac, est enfin parvenu à franchir le détroit. Et vous savez comment ?

— J’avoue mon ignorance, dit Violeta.

—En charmant les Symplégades avec de la musique. En effet, Orphée a joué de la lyre et les roches sont demeurées à jamais écartées.

—  Vous êtes incorrigible, Antonio ! s’écria Violeta en riant. Est-ce qu’il vous arrive parfois de redescendre sur terre ou est-ce que vous vivez tout le temps à travers vos livres ?

 

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— Ne soyez pas injuste avec Monsieur Antonio, commenta Loup. Même si la mythologie a un peu exagéré les faits, les Roches Cyanées ont vraiment existé. La preuve en est que les Anciens avaient érigé la colonne de Pompée pour les signaler aux navigateurs. Ce devait être en réalité d’énormes récifs. Des séismes successifs les ont rabotés au fil des siècles, mais ils existaient encore au temps des Ottomans, puisqu’ils les ont surnommés les « Rochers Sanglants. » Enfin, ma proposition de vous emmener en bateau tient toujours, vous pouvez toutefois emporter une lyre, au cas où les monstres  se réveilleraient !

L’assemblée éclata de rire. Violeta, légèrement grise, s’approcha de la fenêtre.

— Oh ! s’écria-t-elle. Venez voir.

Tous coururent vers la baie. Sur le ciel bleu sombre se découpait une demi-lune parfaite¸ entourée d’une aura orangée. Un long reflet moiré argentait les eaux du Bosphore…

 

 

Le Phare de Rumelifeneri dans Secrets d’Istanbul (2009)

 

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 Tout à coup, la silhouette d’un nouveau phare, celui de Rumeli Feneri, dressé sur un promontoire, se découpe à l’horizon. Encore quelques encablures et Loup dirige son bateau à l’intérieur de la jetée. Des pêcheurs remaillant des filets sur le pont des chalutiers alignés en rang d’oignon, les regardent approcher. Comme la terre ferme est inaccessible à cause de la multitude des embarcations collées les unes contre les autres et séparées par des pneus de voiture utilisés en guise de bouées, le groupe saute de navire en navire pour gagner les quais encombrés de coques en équilibre sur des cales de bois.

 

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Ils gravissent la côte permettant d’atteindre le phare. 

– Nous arrivons, dit Loup, dans un des phares de Michel Pacha. Et maintenant, vous n’allez pas en croire vos yeux. Suivez-moi.

Ils tournent sur la gauche, franchissent une petite porte et chacun  de pousser un cri d’admiration.

– Le seul phare du monde à englober un mausolée dans sa tour, s’exclame Loup. Alors, Antonio, ajoute-t-il en plaisantant, ça, vous ne le saviez pas, n’est-ce pas ?

 

 

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Au centre d’une sorte de minuscule mosquée trône le cercueil du saint, drapé de feutrine verte rebrodée de versets du Coran, surmonté d’un bonnet conique de derviche ceint d’un turban blanc et recouvert d’une multitude de serviettes-éponge servant d’ex-votos. Au mur, une horloge naïve dessinant un minaret en verreries vertes et argent, une tapisserie représentant la Kabba de la Mecque, une multitude de calligraphies et de tableaux religieux sous un lustre de cristal, et, à côté du catafalque, une étonnante imitation de pierre tombale en polystyrène vert rehaussé d’écritures dorées. 

 – C’est le moment de faire un vœu, dit Alice en se glissant sous l’épaule d’Antonio...

 

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 Le Phare de Rumeli Feneri raconté par Michel Pacha dans Secrets d’Istanbul, (2009)

.

Un de mes souvenirs les plus plaisants est celui de la restauration du phare de Rumeli Feneri, aux confins du Bosphore, à l‘embouchure de la Mer Noire. La première tour édifiée s’était effondrée. Les villageois, superstitieux, étaient venus me signifier que le phare ne tiendrait pas si je négligeais la tombe du saint enterré à cet endroit. J’ai alors demandé à un historien de compulser les archives. En réalité, l’emplacement avait accueilli dans l’Antiquité un autel de Zeus, puis, chez les Byzantins, une chapelle dédiée à Saint Georges et enfin, chez les Turcs, la tombe d’un saint nommé Sari Saltuk. J’ai donc résolu de restaurer la dernière demeure du saint et de l’inclure dans la construction. Le phare de Rumeli Feneri est ainsi le seul au monde à comporter un mausolée dans ses fondations. Les habitants du village étaient satisfaits et le phare a tenu. Les pêcheurs ne manquaient pas de venir prier sur le tombeau chaque matin avant de prendre la mer.  Quelle n’a pas été ma fierté  le jour où j’ai vu briller pour la première fois, au sommet du fût octogonal, la lumière blanche clignotante remplaçant le lumignon jadis entretenu à l’huile de dauphin !

 

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Et de contempler en même temps, brillant sur la rive asiatique du Bosphore, la tour jumelle surplombant la falaise d’Anadolu Feneri. Les deux phares éclairaient comme des cierges l’embouchure de la Mer Noire, là où la nef Argos avait échappé aux Roches Cyanées, là où tant de navires avaient fait naufrage depuis la nuit des temps…

 

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  Lien vers mes romans sur Amazon.fr link  Ataturquie.fr link

Editions GiTa Istanbul link

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30 août 2010 1 30 /08 /août /2010 10:40

Mes-Istamboulines-petite-resolution-copie-1.jpg

 

           Le 6 septembre, cela fera exactement 27 ans que je vis à Istanbul. J’ai désormais passé plus d’années dans ma ville adoptive que dans ma ville natale de Cannes.

Pourquoi ai-je tant aimé cette cité qui fut jadis la Nouvelle Rome ?

               Tout d’abord, bien sûr, parce que c’est là que se sont déroulés les événements importants de ma vie:  je m’y suis mariée, j’y ai élevé mes deux fils, j’y ai exercé mon métier de professeur de Lettres. Et puis aussi pour beaucoup d’autres raisons que j’explique dans la préface de mon dernier livre :

 

Je n’écris pas seulement pour mes lecteurs et lectrices. J’écris pour les disparus, pour ceux qui ont écrit avant moi ; j’écris pour les murs et les pierres, pour la mémoire gravée dans les strates de la ville ; j’écris pour tous les écrivains d’Istanbul. J’écris pour les amoureux d’Istanbul de demain.

Quelle est donc la particularité de mon livre ?

Il est entièrement subjectif.

Il est celui d’une passionnée de littérature qui a porté soudain un regard émerveillé sur la cité légendaire dont elle avait rêvé  longtemps à travers les pages des livres et s’est alors mise en quête de ses lieux et personnages.

Celui d’une étrangère qui a quitté sa ville natale et a tenté de s’enraciner dans une autre terre, qui a dû apprendre, parfois avec difficulté, la langue et les coutumes de son pays d’adoption.

Il est celui d’une femme qui a vécu, s’est mariée, a élevé ses enfants dans une culture autre que la sienne, en tentant de s’enrichir de cette différence tout en préservant sa propre identité…

Un jour, j’ai découvert une ville qui m’émerveillait, me fascinait et parfois me chagrinait.

Il s’est établi une correspondance parfaite entre ma sensibilité profonde et cette mégapole baignant dans l’eau, pétrie de souvenirs de toutes les cultures, constituée d’une mosaïque de gens différents. C’est la ville qui m’inspire en tant qu’écrivain. Je la ressens comme « ma » ville.

Ce livre est le fruit de mes étonnements, de mes doutes et de mes bonheurs. Le miroir de l’Istanbul de Gisèle, stambouliote d’adoption.

 

(Mes Istamboulines, Editions GiTa, 2010, en France sur Amazon.fr et Ataturquie.fr)

 

 

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Présentation

  • : Gisèle Durero-Koseoglu, écrivaine d’Istanbul
  • : Bienvenue sur le blog de Gisèle, écrivaine vivant à Istanbul. Complément du site www.giseleistanbul.com, ce blog est destiné à faire partager, par des articles, reportages, extraits de romans ou autres types de textes, mon amour de la ville d’Istanbul, de la Turquie ou d'ailleurs...
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Contributions : Un roman turc de Claude Farrère, Le Jardin fermé, Un Drame à Constantinople...
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Livres de Gisèle Durero-Köseoglu

2003 : La Trilogie d’Istanbul I,  Fenêtres d’Istanbul.

2006 : La Trilogie d’Istanbul II, Grimoire d’Istanbul.

2009 : La Trilogie d’Istanbul II, Secrets d’Istanbul.

2004 : La Sultane Mahpéri, Dynasties de Turquie médiévale I.

2010 : Mes Istamboulines, Récits, essais, nouvelles.

2012 : Janus Istanbul, pièce de théâtre musical, livre et CD d’Erol Köseoglu.

2013 : Gisèle Durero-Köseoglu présente un roman turc de Claude Farrère,  L’Homme qui assassina, roman de Farrère et analyse.

2015 : Parution février: Sultane Gurdju Soleil du Lion, Dynasties de Turquie médiévale II.

 

 

 

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