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30 mai 2012 3 30 /05 /mai /2012 08:45

Primo : Ces derniers temps, on entend de plus en plus de discours remettant en cause la liberté et l’autonomie des femmes. D’après certains hommes politiques, les femmes turques pratiqueraient trop d’avortements et de césariennes. La conclusion de ce raisonnement : limiter de façon drastique les autorisations d’avortements et de césariennes !  1.jpg L’avortement ne serait plus permis au-delà de la quatrième semaine de grossesse et les césariennes soumises à des autorisations spéciales !

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 Lorsque je suis arrivée en Turquie, ce pays battait deux tristes records : celui de la mortalité des femmes lors des accouchements et des suites des avortements clandestins ! Au fil des décennies, ces chiffres ont chuté et  aujourd’hui, ils ne sont pas plus hauts que ceux des autres pays.

Ce triste retour en arrière provoque l’indignation des femmes, de toutes les organisations féminines ou féministes, de nombreux médecins, quelle que soit leur tendance politique.

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Va-t-on renvoyer les femmes à l’aiguille à tricoter ou aux faiseuses d’anges ? Ceux qui prennent de telles décisions sont des hommes. Ils ignorent la détresse de celles qui se voient contraintes à l’avortement. Croient-ils que celles qui se font avorter y vont de gaieté de cœur ?

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Et les jeunes filles enceintes d’un homme qui ne les épousera pas, n’ayant pas de métier car on ne les a pas fait étudier, et incapables d’assumer seules la charge d’un enfant ? Et qui seront mises au ban de leur milieu avec un enfant illégitime ?

E les mères de famille nombreuses qui n’ont pas de quoi nourrir leurs 5 ou 6 enfants et ne peuvent en assumer un septième ?

Et les filles violées ?

Et les femmes qui, pour des raisons personnelles tout à fait légitimes, ne veulent pas d’enfant ?

Et celles qui risquent de mettre au monde un enfant atteint de graves handicaps et à qui la société n’offre, ici, aucun moyen de soulager leur fardeau ?

Il y a une solution au problème de l'avortement : c'est développer l'éducation des femmes dans le domaine de la contraception. Cependant, il existera toujours des "accidents" et priver les femmes de ce droit les poussera à aller mettre leur vie en danger pour avorter coûte que coûte, dans des conditions déplorables !

Dernières nouvelles de 23h30 : dans la plupart des villes de Turquie, les femmes sont descendues dans la rue pour défendre leur droit acquis à l'avortement... A Eskişehir, elles ont forcé à coups de bâton le barrage des forces de l'ordre tentant de les empêcher de manifester...

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Secundo : La polémique autour d’Elif Şafak, qui joue dans une publicité pour une carte de crédit. La situation des écrivains en Turquie est si précaire qu’ils doivent saisir la moindre chance qui s’offre à eux de faire de la publicité pour leurs livres. Il est vrai qu’Elif Şafak, grâce à son talent, est parvenue à une renommée internationale qui la place justement dans le cercle réduit des écrivains turcs vivant de leur plume et n’étant pas contraints d’exercer un autre métier pour survivre. Ceci dit, la polémique autour de son cas est stérile. Si les footballeurs, les actrices de feuilletons télévisés ont le droit de faire de la pub, pourquoi pas les écrivains ?  De plus, Elif Şafak, grâce à sa formidable réussite,  a toujours suscité la hargne des jaloux.  On n’aime les écrivains que tristes et sans le sou !

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En ce qui me concerne, en tant qu’écrivaine, je soutiens Elif Şafak, que j’admire. Bravo Elif, continue, les sommes gagnées dans les pubs te permettront  de te consacrer à ton œuvre…

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Tertio : Un grand artiste menacé, c'est le cas du pianiste et compositeur Fazıl Say, qui  risque d’être condamné à un an et demi de prison pour avoir déclaré son athéisme sur Twitter. Le virtuose de renommée internationale a déclaré n’avoir plus d’autre choix que celui de l’exil...

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J’arrête là car je vais pleurer !  

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Tableau de Eren Eyuboğlu

 

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commentaires

A
<br /> De billets en billets, je n'ai plus qu'une envie : celle de découvrir votre oeuvre. Les questionnements que vous suscitez, les indignations qui sont les vôtres, votre regard sur la société turque<br /> et la démocratie résonnent très fort chez moi, comme chez beaucoup d'autres je n'en doute pas !<br /> <br /> <br /> J'ai beaucoup pleuré en lisant votre note, c'est très exagéré, je vous l'accorde. Je crois que c'est parce que cela éveille (ou réveille) en moi des échos très profonds sur la différence et<br /> l'appartenance, les racines et l'exil, le droit d'être ou de n'être pas...<br /> <br /> <br /> Je suis d'origine belgo-iranienne, née à Paris d'un papa iranien qui ne m'a pas reconnue pour des raisons culturelles, religieuses, traditionnelles (et tout ce qu'on veut d'aussi imbécile !) et<br /> d'une maman d'origine flamande. Je partage la vie d'un homme turc, depuis 16 ans déjà, hors mariage, et me suis vue signifier récemment mon congé au prétexte que je n'ai pu lui offrir une<br /> descendance, ce qui pour la société turque est impardonnable (du moins selon sa famille).<br /> <br /> <br /> J'en suis arrivée à la conclusion qu'il n'existe aucune réconciliation possible entre un système de valeurs méprisant, archaïque, régressif, exclusif et de facto excluant comme celui des sociétés<br /> musulmanes (car la Turquie n'a de laïque que le nom) et des valeurs démocratiques. J'ai découvert que sous les signes extérieurs de la plus grande modernité, même les jeunes gens restaient<br /> inféodés à des principes d'un autre âge, profondément irréconciliables avec l'idée d'ouverture au monde. Je n'en suis ni choquée, ni déçue, non, c'est pire que cela : j'en suis profondément<br /> affectée !<br /> <br /> <br /> J'ai choisi, inconsciemment sans doute, de partager la vie d'un turc pour être au plus proche des racines qui sont les miennes et auxquelles il m'a été interdit, dès la naissance, d'accéder.<br /> L'Iran partage avec la Turquie une frontière commune, une langue quasi-similaire, des origines indo-européennes communes. Je n'irai jamais en Iran, les voyages touristiques comportent trop de<br /> risques et trop d'inconnues. Je ne connaîtrai ni ma langue d'origine, ni ma famille, ni mon histoire. Je ne me sens pas plus reconnue par la société turque et n'y trouverai pas plus ma place. Les<br /> gens comme moi doivent-ils vivre sans identité jusqu'à la fin de leurs jours au prétexte qu'ils ne sont ni ceci, ni cela, et surtout pas musulmans ? C'est une question toute rhétorique, j'en<br /> connais déjà la réponse. Bien sûr, on pourra toujours me donner des tas de contre-exemple de gens qui vivent parfaitement en Orient bien qu'occidentaux...oui, mais si l'exception existe, elle<br /> n'est jamais là que pour venir confirmer la règle !<br />
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G
<br /> <br /> Votre lettre est très<br /> touchante et je compatis à votre détresse car je crois que vous avez été confrontée à des cas extrêmes. En effet, il me semble que les milieux que vous décrivez sont ceux de l’immigration, où<br /> certaines personnes se replient sur des idéaux et des traditions n’existant plus depuis longtemps dans leur pays d’origine. En dépit des volontés rétrogrades de certains, la Turquie s’est<br /> énormément modernisée sur le plan des mentalités, actuellement, la plupart des femmes travaillent et ont acquis une indépendance financière  et je ne peux imaginer un retour en arrière v ers<br /> des coutumes obsolètes. Quant aux enfants de couples mixtes, et j’en ai connu beaucoup en tant que professeur, ils sont généralement bien intégrés, je dirais même que leur double culture est<br /> plutôt un avantage car les Turcs manifestent très souvent une curiosité bienveillante envers  tout ce qui est étranger.  Je vous souhaite de la patience et du courage pour surmonter toutes ces épreuves.<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> Espérons que les parapluies ne soient pas eux aussi interdits...<br />
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E
<br /> Oui de bien sombres nuages se profilaient à l’horizon. Ils s’accumulent maintenant au dessus de nos têtes. Il est grand temps<br /> d'ouvrir les parapluies. Merci de l’avoir souligné!            <br /> <br /> <br />  <br />
Répondre
M
<br /> Chère Gisèle, je partage votre point de vue...les femmes, les écrivains, les arts et je pense à ce qui se passe pour le théâtre en ce moment... je déplore ce retour en arrière et je soutiens les<br /> personnes qui 'osent' défendre leurs droits et la liberté... merci pour ce mot d'humeur.<br />
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  • : Gisèle Durero-Koseoglu, écrivaine d’Istanbul
  • : Bienvenue sur le blog de Gisèle, écrivaine vivant à Istanbul. Complément du site www.giseleistanbul.com, ce blog est destiné à faire partager, par des articles, reportages, extraits de romans ou autres types de textes, mon amour de la ville d’Istanbul, de la Turquie ou d'ailleurs...
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  • La Trilogie d'Istanbul : Fenêtres d’Istanbul, Grimoire d’Istanbul, Secrets d’Istanbul. La Sultane Mahpéri, Mes Istamboulines, Janus Istanbul (avec Erol Köseoglu), Sultane Gurdju Soleil du Lion.
Contributions : Un roman turc de Claude Farrère, Le Jardin fermé, Un Drame à Constantinople...
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Livres de Gisèle Durero-Köseoglu

2003 : La Trilogie d’Istanbul I,  Fenêtres d’Istanbul.

2006 : La Trilogie d’Istanbul II, Grimoire d’Istanbul.

2009 : La Trilogie d’Istanbul II, Secrets d’Istanbul.

2004 : La Sultane Mahpéri, Dynasties de Turquie médiévale I.

2010 : Mes Istamboulines, Récits, essais, nouvelles.

2012 : Janus Istanbul, pièce de théâtre musical, livre et CD d’Erol Köseoglu.

2013 : Gisèle Durero-Köseoglu présente un roman turc de Claude Farrère,  L’Homme qui assassina, roman de Farrère et analyse.

2015 : Parution février: Sultane Gurdju Soleil du Lion, Dynasties de Turquie médiévale II.

 

 

 

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