En ce début de semaine de Toussaint et de Fête des Défunts, voilà une petite visite mémorielle dans le très célèbre cimetière du Château de Nice.
Si je lui ai attribué le qualificatif de « marin », c’est qu’il offre un imprenable panorama sur la baie de la ville et laisse entrevoir, entre les branches des arbres, le bleu de la mer.
Elevé en 1783 sur les ruines de la citadelle détruite par Louis XIV, il possède autour de 2800 tombes disposées en terrasses, dont certaines sont de véritables mausolées ; d’autres sont ornées de statues gigantesques dont les sculpteurs ont remporté huit Prix de Rome et qui permettent de le comparer au cimetière de Gênes.
On y trouve beaucoup de sépultures de personnages historiques (Léon Gambetta, Emil Jellinek, fondateur de Mercedes…), célébrités du monde des arts (Alfred Van Cleef, joaillier, Gaston Leroux, écrivain, René Goscinny, auteur de bandes dessinées, Georges Lautner, cinéaste) ou Anglais qui ont fait la réputation de la Côte d’Azur. Notons que même dans certaines tombes récentes, les familles perpétuent la tradition de la statuaire.
A côté se trouve le cimetière juif, dont l’entrée se caractérise par un cénotaphe à la mémoire des déportés.
« Cette urne contient des cendres de nos martyrs assassinés dans les chambres à gaz et les fours crématoires d’Auschwitz, Pologne »
La deuxième colonne grave dans le marbre le souvenir des horreurs de la guerre : « Cette urne contient du savon à la graisse humaine fabriqué par les Allemands du III e Reich avec les corps de nos frères déportés. »
Une stèle qui a attiré mon attention par le nom des Camondo, célèbre famille ottomane qui avait émigré en France au XIXe siècle (où leurs descendants ont connu un tragique destin, cent ans plus tard, lors de la Seconde Guerre mondiale, disparaissant tous à Auschwitz…) et dont plusieurs monuments perpétuent encore le souvenir à Istanbul, comme l’Escalier Camondo, l’Immeuble Camondo ou le mausolée d’Abraham Camondo...
Je finirai par quelques vers de Baudelaire enjoignant à ne pas oublier les défunts :
Les morts, les pauvres morts, ont de grandes douleurs,
Et quand Octobre souffle, émondeur des vieux arbres,
Son vent mélancolique à l'entour de leurs marbres,
Certes, ils doivent trouver les vivants bien ingrats,
A dormir, comme ils font, chaudement dans leurs draps,
Tandis que, dévorés de noires songeries,
Sans compagnon de lit, sans bonnes causeries,
Vieux squelettes gelés travaillés par le ver,
Ils sentent s'égoutter les neiges de l'hiver
Et le siècle couler, sans qu'amis ni famille
Remplacent les lambeaux qui pendent à leur grille...
commenter cet article …